Les voies de recours de la nouvelle loi sur l’exercice des droits politiques

Les médias se sont faits plutôt discrets sur ce thème, mais le Bulletin du Cercle démocratique ne peut pas passer à côté, ce d’autant moins que 2022 est une année électorale dans le canton de Vaud. Le 1er janvier 2022 est entrée en vigueur une importante refonte de la loi vaudoise sur les droits politiques (LEDP). Petit tour d’horizon concernant les droits permettant aux citoyens de contester des décisions sur l’exercice des droits démocratiques, autrement dit les «voies de recours».

Commençons d’abord par ce qui ne change pas. D’une façon générale, les délais de contestation restent extrêmement brefs : limités à trois jours. Cette brièveté vise à ne pas entraver le processus démocratique; la procédure doit donc être rapide. Pour les membres du corps électoral, cela signifie qu’il ne faut pas tergiverser, mais décider rapidement d’agir… ou de ne rien faire et en accepter les éventuelles conséquences. C’est ainsi qu’une personne estimant qu’une inscription ou une radiation a été opérée à tort dans le registre des électeurs doit déposer sa réclamation dans les trois jours auprès de la municipalité dès qu’elle découvre le problème, mais cela au plus tard le lundi précédant le scrutin. La municipalité tranche la contestation dans les trois jours ; si la personne n’est pas satisfaite de la décision, elle peut recourir au Conseil d’État… dans les trois jours.

S’agissant des nouveautés, le préfet ou la préfète devient l’autorité de recours compétente pour les litiges ayant trait à un scrutin communal ou intercommunal (et non plus le Conseil d’État). Les préfectures pourront ainsi non seulement instruire le dossier qui leur est présenté comme ce fut le cas jusqu’ici, mais en plus prendre une décision. Ce système est à l’avantage de la proximité de terrain dont on espère une plus grande acuité dans l’appréciation du contexte local. La contestation d’un scrutin communal ou intercommunal s’exerce aussi dans les trois jours par le dépôt d’un mémoire écrit comportant un exposé sommaire des faits, les motifs et des conclusions. Les décisions préfectorales pourront être déférées devant la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal qui agira en qualité d’autorité de deuxième instance. Dans ce cas, le délai de recours sera de dix jours dès la publication officielle de la décision litigieuse.

Quant aux éventuels recours contre la brochure explicative, ils peuvent désormais être déposés de manière plus précoce, la publication de la brochure faisant démarrer le délai de recours. Selon les cas, cela pourrait permettre aux autorités d’agir avant le jour du scrutin et de prendre les mesures qui s’imposent pour rétablir la régularité du processus de vote. Si la contestation porte sur la brochure explicative émanant du Conseil d’État, cette autorité ne sera plus compétente pour en juger. Le recours s’exercera alors directement auprès de la Cour constitutionnelle qui est une autorité judiciaire indépendante. Cette façon de faire applique ainsi de façon plus stricte les principes d’un État de droit.

La nouvelle loi allège les procédures provisionnelles et pré-provisionnelles, qui doivent être rendues très rapidement, comme leur nom l’indique. Il s’agit par exemple de la dénonciation d’irrégularités constatées et devant cesser sans délai. Ainsi, le Grand Conseil et le Conseil d’État jusqu’ici compétents, cèdent la compétence correspondante au bureau du Grand Conseil, respectivement au département concerné, ce qui permettra de répondre à une contestation provisionnelle avec toute la célérité requise. Une décision négative rendue sur mesures provisionnelles peut elle aussi être portée dans les dix jours devant la Cour constitutionnelle. Gardons néanmoins à l’esprit que les contestations n’ont pas d’effet suspensif et n’entraînent donc un changement que si elles débouchent sur une admission, la situation initiale étant maintenue telle qu’elle durant la procédure.

Enfin, un mot sur les recours contre les décisions relatives à la validité d’une initiative populaire qui font l’objet d’un chapitre particulier dans la loi. Tout membre du corps électoral peut contester une telle décision devant la Cour constitutionnelle, et cela dans les vingt jours dès sa publication, par un mémoire écrit dûment motivé et comportant des conclusions.

Pas si simple de s’y retrouver et ce d’autant moins que les délais de trois jours portent sur la plupart des contestations, ce qui ne laisse pas beaucoup de temps. Il faut donc être sûr avant d’agir et foncer, cas échéant! La procédure est généralement gratuite, mais peut devenir onéreuse en cas d’action téméraire. Statistiquement, les cas admis sont plutôt rares, ce dont il faut déduire que les choses démocratiques sont assez bien menées dans notre canton; on ne peut que s’en réjouir.

Plus d’infos:

(article publié dans Bulletin du Cercle démocratique No 1 • mars 2022, p. 38)