Naturalisation des “secundos”, pas si “facilitée” que cela

Les «secundos» constituent la seconde génération de résidents suisses. Il s’agit donc des enfants d’immigrés. Contrairement à ces derniers, les «secundos» naissent en Suisse et ne connaissent pas forcément leur patrie d’origine. Si certains héritent du permis de séjour ou d’établissement de leurs parents, d’autres préfèrent embrasser la nationalité suisse par la voie «ordinaire» ou par la voie «facilitée». De quoi s’agit-il au juste et quelles sont ces deux pistes menant au sésame national?

Tout d’abord, si la «naturalisation facilitée» existe, c’est qu’il en existe une autre : la «naturalisation ordinaire», et autant dire qu’elle n’est pas facile, puisqu’il faut avoir une autorisation d’établissement (permis C), résider dix ans en Suisse, dont trois sur les cinq ans avant le dépôt de la demande. Le temps passé en Suisse entre l’âge de 8 et 18 ans compte double à condition d’avoir passé au moins six ans en tout en Suisse. Les cantons ajoutent parfois quelques années de résidence sur son sol ou dans une même commune. Dans le canton de Vaud, il faut avoir séjourné deux ans dont l’année précédant la demande ; les communes peuvent imposer une durée de séjour d’un an sur leur territoire. À cela s’ajoutent bien entendu des conditions standards d’intégration réussie, de solvabilité et de sécurité, mais également des connaissances spécifiques sur la Suisse, sa géographie, son histoire, sa politique et sa société; le tout fait l’objet d’un rapport d’enquête et d’un examen, comme dans les «Faiseurs de Suisses»…

La naturalisation facilitée est un peu moins exigeante. Elle s’applique au conjoint d’un ressortissant suisse ainsi qu’à leurs enfants. Attention, ces avantages ne concernent donc pas l’enfant né en Suisse de deux ressortissants étrangers. Le «secundo» suisse a donc en principe un parent suisse, sinon il n’aura pas d’autre choix que de passer par la procédure de naturalisation ordinaire. Seul le – moins médiatique – «tercero» peut concourir à la naturalisation facilitée s’il a des parents étrangers, mais avec la condition que sa famille soit en Suisse depuis trois générations et s’il fait sa demande avant l’âge de 25 ans.

À ces conditions s’ajoutent aussi une certaine durée. Le conjoint suisse ne peut déposer sa demande de naturalisation facilitée que s’il vit au moins depuis trois ans en union conjugale et depuis cinq ans en Suisse. Autrement dit, si une Suissesse épouse un étranger qui vit en Suisse depuis deux ans, ce dernier pourra demander une naturalisation facilitée après trois ans de vie conjugale. En revanche, si la Suissesse fait venir son fiancé de l’étranger, il faudra attendre cinq ans.

Si la naturalisation est «facilitée», cela ne veut pas dire qu’elle est rapide. Il faut en effet attendre au moins une année et demie après le dépôt de la demande pour obtenir le passeport rouge. Il en coûte de CHF 250.- pour un enfant de moins de douze ans, puis CHF 650.- ensuite et CHF 900.- dès 18 ans. Une fois octroyée, il faut rester bien sage, car la nationalité peut être retirée s’il y a du grabuge, mais à la condition que la personne en question soit double national. Cette «déchéance» reste néanmoins un peu théorique.

Et bien sûr, comme pour la naturalisation ordinaire, le passeport à croix blanche exige quelques conditions personnelles d’intégration, telle la connaissance d’une langue nationale (niveau B1 à l’oral et A2 à l’écrit), le respect des valeurs suisses (constitution, solvabilité, impôts payés, pas d’infraction,…), la participation à la vie économique et le soutien de sa famille. En somme, il faut être plus suisse qu’un suisse, sachant que tous les suisses ne sont pas des citoyens modèles à ce point… mais c’est une autre histoire.

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(article publié dans Bulletin du Cercle démocratique No 2 • mai 2022, p. 28)