L’environnement, c’est aussi du droit

La protection de l’environnement, ce n’est pas que de la politique. Depuis le 1er janvier 1985, la loi fédérale de l’environnement régit ce domaine du droit, qui s’est beaucoup développé depuis et dont l’extension semble promise à un bel avenir. Petit tour d’horizon.

L’article 73 de la Constitution fédérale fixe le principe du développement durable en ce sens que les autorités œuvrent à l’établissement d’un équilibre durable entre la nature, en particulier sa capacité de renouvellement, et son utilisation par l’être humain. L’article suivant prescrit d’une façon laconique que la Confédération est tenue de légiférer sur la protection de l’être humain et de son environnement naturel contre les atteintes nuisibles ou incommodantes. Elle veille à prévenir ces atteintes. Les frais de prévention et de réparation sont à la charge de ceux qui les causent. Il s’agit du cœur du principe aujourd’hui bien connu, dit du «pollueur-payeur».

Ces éléments sont concrétisés par la loi fédérale de l’environnement qui offre un cadre à tout l’arsenal législatif composé de multiples lois et ordonnances, complétées par une jurisprudence foisonnante et évolutive. Le mécanisme a pour objectif de lutter de façon préventive contre les nuisances incommodantes en essayant de les éliminer, sinon de les réduire à leur source (lieu d’émission) ou au lieu de leur impact (lieu d’immission). L’action peut cependant être limitée si l’état de la technique ne le permet pas ou si la charge économique que cela implique n’est pas supportable.

S’il est évident qu’il faut observer ces principes lors de toute construction ou installation nouvelle, il n’en demeure pas moins que le droit de l’environnement reste d’application immédiate, c’est-à-dire qu’il peut intervenir aussi à l’endroit de situations de nuisances existantes émanant d’anciennes constructions ou installations, cela pour autant que les émanations occasionnent une gêne qui dépasse les standards admissibles. En pareille situation, une procédure d’assainissement peut être suivie, qui vise à éliminer, sinon réduire les nuisances.

Le système est large et touche de multiples domaines qui vont de l’eau au bruit, en passant par l’air, soit la pollution atmosphérique, mais aussi les odeurs, les trépidations ou la lumière, voire le rayonnement, ainsi que les sites pollués ou contaminés, et plus largement les déchets, la protection de la faune, de la flore ou des forêts («équilibre écologique»). Le droit de la protection de l’environnement se cache parfois où on ne l’imagine pas. S’il paraît évident que les citoyens peuvent l’invoquer pour se protéger du bruit d’une autoroute, il l’est moins lorsque le bruit émane de la simple présence humaine, comme des terrasses de cafés, et pourtant les mêmes principes s’appliquent.

Tout est question de mesures, cela va sans dire, mais tout ne se mesure pas, comme les odeurs. Tout est question de proportions et de sensibilités, tant il est vrai qu’une gêne affecte le ressenti, qui n’est pas le même chez l’une ou l’autre personne. Des cloches de vaches font parfois trop de bruit, même à la campagne ; le cèdre du voisin peut projeter une ombre s’avérant incommodante ; l’odeur de biscuit de la fabrique du village devient écœurante à la longue. La pratique des tribunaux cherche donc à objectiver les atteintes pour mettre en place une certaine équité. Beaucoup de difficulté et de défis à relever dans un domaine du droit qui est en pleine évolution dans une perspective débattue d’«urgence climatique», qui n’a assurément pas fini de faire des vagues!

(article publié dans Bulletin du Cercle démocratique No 4 • mai 2021, p. 32)